samedi, juin 13, 2020


1933

l’histoire bascule 

elle interroge 

Allons-nous vers la révolution prolétarienne 



sans renoncer au combat 

elle déploie 

dans ce texte crépusculaire 

un pessimisme

critique qui augure les ténèbres 

à venir

elle dissèque 









l’impossibilité d’émancipation face à des régimes bureaucratiques qui oppressent les masses  face à l’ouvrier broyé par la machine  cantonné à 

un rôle de soumission à la société

au cœur des remous de l’époque 

elle met dos à dos 

l’URSS 
de Staline et le fascisme naissant du Troisième 
Reich  

refuse 
les positions trotskistes et laisse entendre  
malgré 

une certaine fatalité
une voie possible 

au travers 
de l’idée anarchiste de souveraineté des travailleurs  

et non 
de celle du travail au mépris des travailleurs

par cette 
organisation horizontale du travail 

elle écarte 

l’idée de défaite  

et recherche 
par tous les moyens possibles la lutte au nom de tout 
ce qui fait 

la valeur de la vie humaine 






































je suis bûcheron dans les forêts profondes 

je suis cueilleur d’oranges en Californie

je suis marin sur le Pacifique

je suis vide d’idées et peu sonore

je suis un silence et un point d'appui

je suis un chargement d'encre

je suis une espèce d'implosion

je suis peur et opacité

je suis dans la disposition et le nombre

je suis 

dans 
un système de figures arrangées et 
mesurées






je suis dans le sens de l'effort

je suis dans l'abstraite clarté 

je suis translucide

je suis pelage et  reflet

je suis la main délirante de l'écriture

je suis l'air et sa puissance

je suis le blanc rythmé et sa nudité naturelle

je suis une parenthèse aléatoire

je suis un texte séparé du livre

je suis un attribut rhétorique de l'écriture

je suis une privation

je suis l'absence corporelle 

je suis une phrase que le point rassemble

je suis le renversement



se 
retrouver 
dans 

je suis

je suis
un état 
d’extrême secousse

une
éclaircie 
d’irréalité avec 
dans 

un coin
de moi-même 
des morceaux du monde 
réel





il 
ne me faudrait 
qu’

un seul mot parfois 

un simple petit mot 
sans importance pour être
grand 

pour parler sur le ton des 
prophètes

un mot-témoin

un mot précis

un mot subtil

un mot bien macéré 

dans 
mes moelles 
sorti de moi  qui se 
tiendrait à l’extrême bout de
mon être et qui pour tout le monde 
ne serait 
rien


je suis témoin

je suis le seul témoin

de
moi-même
cette écorce de mots ces
imperceptibles transformations 
de ma pensée































c'est elle

la petite morte derrière les rosiers


je suis 

le savant au fauteuil sombre

je vous indiquerais

les richesses inouïes

toutes les merveilles classiques de l'architecture


comme les dix mois de la nuit rouge

le sang

les fleurs 

le feu

les bijoux






poète

celui qui accepte d'être l'esclave attentif de ce qui

le dépasse




la véritable justice

ne peut être aperçue tant que le voile de l'égoïsme

n'est pas écarté

des yeux






comment

s'était-elle demandé

peut-on savoir quoi que ce soit sur les gens

quand on songe à la façon dont

ils se barricadent

?


voici

que cela finit par des anges de flamme

et de glace

et

sans

la promesse de plus hautes

joies
































tu suis ton chemin de la grandeur  

maintenant

ce qui jusqu’à présent était ton dernier danger

est devenu

ton dernier asile



tu suis ton chemin de la grandeur 

il faut maintenant que ce soit

ton meilleur courage

de n’avoir plus de chemins 

derrière toi








tu suis ton chemin de la grandeur 

ici

personne ne se glissera

à ta suite


tes pas eux-mêmes

ont effacé ton chemin derrière toi

et au-dessus de ton chemin 

il est écrit

Impossibilité







































Ce livre est, à sa façon, une visite : non seulement de la maison que fit bâtir, en 1930, l’architecte Léon Claro, grand-père de l’auteur, pour rendre hommage au style néomauresque lors du centenaire de l’Algérie française, mais également de tout un passé – intime, historique, littéraire, politique – auquel l’écrivain avait toujours refusé de s’intéresser. 












Reconnaissant enfin, dans cette maison indigène, une vraie “boîte noire” dont il importe d’extraire la mémoire, Claro apprend qu’elle a été visitée en 1933 par un jeune homme de vingt ans, Albert Camus, lequel en ressortit littéralement ébloui et écrivit alors un de ses tout premiers textes : “La Maison mauresque”, véritable acte de naissance littéraire du futur prix Nobel. 

Mais la “Villa Claro” – ainsi qu’on l’appelait parfois – a également accueilli un autre créateur : Le Corbusier, que Léon Claro convia à Alger en 1931 et qui, à cette occasion, s’égara dans la Casbah, allant jusqu’à s’aventurer dans une autre maison, “close” celle-là, où l’attendait le secret de son esthétique à venir.

Au cours de cette enquête, Claro est amené à croiser d’autres visiteurs, tel le poète Jean Sénac, qui avait pris son père en amitié, mais aussi Visconti,venu à Alger tourner l’adaptation de L’Étranger. 

Camus, Sénac, Le Corbusier, et quelques autres, tous fascinés par la Ville Blanche ou pris dans la tourmente de la guerre d’Algérie – et chacun détenant, à sa manière, une clé de la “maison mauresque” : il fallait donc forcer des serrures, pousser des portes. 

Dont une, inattendue, donnant sur une pièce que l’écrivain croyait vide : celle du père.


lecture versatile