jeudi, mars 12, 2020




les feuilles 
traversées de lumière

se 
changent

en 
émeraudes

en 
topazes






au commencement est 
l'identité

le 
principe d'identité

au commencement est 
l'imitation


comment faire sans 
expliquer

?

je 
cherche 
maintenant

un 
invariant

je
cherche
aveuglément

une 
stabilité 
nouvelle secrète

peut-être inouïe


brusques
métamorphoses de la lumière électrique

aux tons crépusculaires
et étranges

je 
ne parle plus 
de variations chute ou 
circulation

je parle 
des transformations


elle 
détecte 
les fibres 
des moindres 
ondes


la 
légèreté s'aggrave 
légèrement

le thème 
est-il encore audible 
sous le bombardement très méticuleux 
de la ligne mélodique 
sous la noise du bruit de fond

?



































même 
les paroles muettes
prononcées tacitement 
dans le secret de notre être
peuvent se transformer en substance 
active



le silence 
a aussi ses échos





et
l'homme
ne peut produire

une 
pensée

une parole

ou

un acte
que cela ne s'exprime
sur l'éternel miroir où tout se grave
et rien ne s'efface






tous les êtres reposant sur 
leur propre racine 

c'est 
de la fermentation de cette même racine 
qu'ils doivent tous attendre 
leur développement


si cette racine 
n'opère pas en nous cet acte végétatif 
de la lumière  

elle opère sa propre destruction 
en se dévorant 
elle-même

ainsi 
nous portons en nous 
notre vie et notre mort et c'est pour cela 
qu'il est écrit 

que 
celui qui voudra ménager sa vie 
la perdra


désir
































le 
pavillon 
de son oreille 
avait au toucher

la 
fraîcheur
la 
rugosité
la 
froideur

le 
juteux 
d’
une feuille








notes 
sur ce que 
je 
cherche

je
n’ai jamais été à l’aise 
pour parler


une manière 
abstraite et théorique

un programme 
depuis longtemps élaboré

un projet 
de longue date

un livre à venir

un 
inachevé 
désignant l’indicible 


un 
chemin
un espace 
un itinéraire 


une recherche 

dont 
je ne saurais 
dire le pourquoi

je 
sens confusément 
que les livres que j’ai écrits 
s’inscrivent

prennent 
leur sens dans 

une image globale 


un au-delà de l’écriture

un 
pourquoi j’écris 

auquel 
je ne peux répondre 
qu’en écrivant


un 
puzzle 
inexorablement 
achevé



































respirer
est

un problème

qu'on le considère
comme tel
ou non








il y a
certains problèmes
physiques dont nous sommes
victimes

il
faudrait
se concentrer
sur eux
mais

les exprimer
en termes logiques
ne sert à rien

les
problèmes
de la pensée se
ramènent à des lapalissades

en
parler n'y ajoute
rien

je 
me suis
toujours intéressé
à l'idée d'ouvrir

un 
établissement
pour paresseux


je
conviens
que pour autant
qu'ils reconnaissent
la primauté du changement
dans la
vie

je suis

influencé par
Bergson et Nietzsche 


changement et vie 
sont 
synonymes

il faut en
prendre conscience
et l'accepter

le changement 
est ce qui rend la vie intéressante 

il
n' y a
pas
de
progrès

le changement
est tout ce qu'on connaît

il
n'y a pas
de
fin

on
construit
tautologiquement

et on arrive
à rien







































tu
n'éprouveras 
rien

séparément

que ce serait bon
si c'était déjà possible

!












c'est 
déjà possible 

!

et 
non 
demain

!





tu
fais 
ce qu'il faut 
faire

tu 
te transformes

tu
cèdes à l'appel
et 
tu viens

cela suffit


si 
tu te 
transformes
la matière elle aussi 
est obligée de se transformer 















































Défense 
illustration impatience et épluchures 
de la langue française 

est 
un texte 

faussement 
simple fait de matériaux 
bruts  

il 
pourrait être lu comme 
la laisse 
d'

un
collision 
des mondes  
leur usure leurs rebonds  

il n'y a 
pas de décors 

les 
acteurs ont disparus 

les 
artères s'agrègent

la langue 
est faite par les invisibles 
qui la portent et 
s'en délestent

voix multiples 

charge 
critique poudrée d'ironie 
et de mélancolie  

recevez 
cet amas d'épluchures 
comme le futur engrais de la langue  


vous 

trouverez 

la 
poursuite 
du mouvement  

des 
pénuries 
ou 
des émeutes  

bruits 
de couloir  

un 
rythme 
continu entre 
quelques craquelures

les presses du réel

*


Ah
C'est trop peu
Je vais me casser la tête
Finir sur la croix
Du style : Ah oui mais
J'ai l'honneur de servir notre pays
Nous sommes sortis de la vague
Se couvrir la bouche et le nez pour tousser ou éternuer
Impossible de résister à son chic
Il est toujours souriant
Les trains arrivent à l'heure
Le chaos remplace la musique
Ex-minet de boys band
Mirliflore selon sa propre définition
Avec les moyens du bord
Bande de motards
Dans leur petite bulle
Rushes d'un film d'horreur
Les qualificatifs manquent pour décrire
Intime est crypté
Le grotesque et la parodie
L'ordre par haut-parleur
Ne se passe comme prévu
Là que ça vibre là
La nouveauté et l'écume des choses



Des phrases comme des coups de sonde dans cette langue que nous utilisons tous les jours : Daniel Pozner a laissé traîner ses yeux et ses oreilles puis a fabriqué, avec tous les fragments récoltés, un long poème. Défense, illustration, impatience et épluchures de la langue française est un livre étonnant, qui fonctionne par rapprochements cohérents ou incongrus, saute d'un ton à un autre. Autant pour relever le ridicule d'expressions de tous les jours que pour faire ressortir la beauté s'aventurant dans les conversations

Guillaume Lecaplain, Libération


Lorsque l'on commence la lecture de Défense, illustration, impatience et épluchures de la langue française, il est impossible de l'interrompre, happé qu'on est par l'avancée imperturbable d'un flot d'observations, citations, expressions, voix, tournures, prélèvements bruts du langage, parfois tronqués ou laissés en suspens, qui se déploie, scandé jusqu'au vertige [...]. [Ce texte] [...] convoque une trame liée à l'histoire et à l'état du monde, dans une construction qui avance inexorablement, tenant le lecteur en haleine. A lire de toute urgence ! 

Sarah Kéryna




































Kitasono Katué


































Kitasono Katué 1902-1978 est le créateur au Japon de la revue VOU  seule revue d'avant-garde avec ASA de Niikuni  dont il réalisera toutes les couvertures. 

Kitasono Katué a été en correspondance avec André Breton dans les années 1930  avec Ezra Pound qui l'appelait KitKat et pour les contemporains avec Jean-François Bory

Pour la poésie concrète  il a échangé avec Haroldo de Campos et a développé dans les années 1960 le  Plastic Poem  à base photographique







Comme 
il le dit dans un texte 
de 1966 

L'
appareil 
photographique 
peut créer 
un merveilleux poème
même à partir d'objets insignifiants… 

un poème plastique 

qui 
n'a besoin ni de lignes ni de strophes 
est la figure 
d'

un poème lui-même

en 
d'autres mots 
c'est 

un 
dispositif 
pour un poème 
pour lequel rythme et sens ne sont pas 
des facteurs essentiels

à la même époque  
il réalisera 3 petits films
dont les titres sont en français

Un corps à corps 

Le temps de la fille 

Une idée verticale 


Kitasono Katué a eu une exposition aux Etats-Unis au LACMA à Los Angeles organisée par John Solt  et un musée lui est consacré à Kyoto