jeudi, février 27, 2020





Ingrid Milhaud

photographie

l'été avant l'Orage

*







Si on a souvent parlé de « littérature pure » à propos de Proust, on aurait tout aussi bien pu parler de la Recherche comme d’une entreprise de « connaissance pure ». 

Le terme « pur » renvoie ici à ce que Thibaudet voulait dire quand il a écrit qu’ « il y a chez Proust une fusion d’éléments pareillement rebelles à tout pli professionnel : vie mondaine pure, psychologie pure, littérature pure ». 

La connaissance pure est une connaissance qui, comme c’est le cas justement de celle de l’écrivain, ne comporte rien de spécialisé et de professionnel, ne raisonne pas en fonction des conséquences et des applications pratiques, et ne se préoccupe que de la vérité. 

Se détourner de la recherche de celle-ci revient, pour Proust, à se détourner de la littérature elle-même ; et c’est ce que font ceux qui s’efforcent de la mettre au service d’objectifs qui, en réalité, ne constituent que des prétextes pour s’éloigner d’elle et échapper à ses exigences, comme la description exacte des faits ou de la réalité, le triomphe du droit, l’intérêt de la nation, etc. 

L’artiste ne peut servir sa nation qu’en tant qu’artiste, par la contribution qu’il apporte à la connaissance, au sens indiqué, « c’est-à-dire qu’à condition, au moment où il étudie ces lois, institue ces expériences et fait ces découvertes, aussi délicates que celles de la science, de ne pas penser à autre chose – fût-ce à la patrie – qu’à la vérité qui est devant lui .


Jacques Bouveresse
La connaissance de l’écrivain 
Sur la littérature la vérité et la vie
éd Agone
2008
































un cri 

roule comme

une perle


une sphère 
roulante est aperçue









en se 
métamorphosant 
elle métamorphoserait 

un jour
toute la terre
en 

une pente ondoyante





un 
bruissement 
léger

espoir 
de se laisser distraire 
sans fin




un 
insecte 
bourdonne

je 
me 
rappelle 
vaguement
avoir 
fait 

une promesse




une attente

lieu étroit
nommé par diminution

dépourvu d'espace
je suis facilement tenté
de la réduire 
à

un problème






un seul éblouissement

particules

éviter
les éléments
qui s'accumulent vite

dispersion



une 
vibration 
d'encre

le point critique
où la gravité ne déforme pas
les objets adjacents 






une intensité de vie 
devenue intensité 
de langage 

et 

une intensité de langage 
devenue intensité 
de vie


ces mots
peuvent s'éparpiller
en cercles concentriques

je ne peux
qu'emprunter
le chemin de routine
et picorer les termes d'hier
durcis


























lojban

langue logique

le mumoi plini cu mutce le ka cizra .i py cmalu traji fo le romei .i le canlu cu satci banzu le nu canlu le garna tergusni kujoi le tergusni cikygau .i le cmalu noltrube'a na snada le nu jimpe le du'u makau prali bu'u lo pagbu be le kensa re'o lo plini noi claxu lo'e zdani .e lo'e se xabju ku'o fi lo'e garna tergusni .e lo'e tergusni cikygau

La cinquième planète était très curieuse. C’était la plus petite de toutes. Il y avait là juste assez de place pour loger un réverbère et un allumeur de réverbères. Le petit prince ne parvenait pas à s’expliquer à quoi pouvait servir, quelque part dans le ciel, sur une planète sans maison, ni population, un réverbère et un allumeur de réverbères.

le petit prince



lojban

son étymologie de  langue logique  ne rend pas justice au but de ce langage : 

il n’est pas réservé à la logique formelle ni destiné à être utilisé uniquement en informatique et convient tout aussi bien à une utilisation humaine  servant pour les communications courantes 

selon le degré d’abstraction ou les choix de construction voulus par le locuteur  le lojban peut se rapprocher du langage naturel, d’un langage de programmation ou de toute autre langue connue. 

il peut par ailleurs être poétique ambigu précis ou neutre



































Helen Frankenthaler 

Free-Wheeling 

1971

Edition of 21































Barnard Galaxy 

NGC 6822


avec écriture 
manuscrite de Hubble

10 juillet 1923





































poésie


il faut suivre la chose avec

le mot

jusqu'au point où

elle devient


un mince tourbillon 

de neige













le mot neige

pourrait aussi bien être de la vraie neige


aujourd'hui

il l'est



la neige 

avec épaisseur de nouveau 

se fait sentir

je respire



































je vois 

le temps comme

une sorte de tension

mais

est-ce que je vois 
ou est-ce que je me vois 
voir 

?





lumière

vérité

tu me le montreras


me donnes-tu 
l'ordre d'approuver l'idée 
selon laquelle le temps est le mouvement
d'

un corps 

?

NON

et 
je comprends bien 
qu'aucun corps ne peut se mouvoir 
hors du temps

c'est toi qui le dit

mais

je 
ne comprends pas 
que le mouvement même 
d'

un 
corps 
soit le temps

et ça tu ne le dis pas




si

je 
le vois longtemps

je
peux seulement dire
que le temps est
long

mais
sans préciser de combien




un corps peut changer

il
peut bouger

il
peut s'arrêter

c'est le temps qui nous permet
de mesurer
non seulement son 
mouvement
mais aussi son
arrêt


son repos 
a été aussi long que son mouvement
disons-nous







le temps

n'est 
pas le mouvement
d'

un corps



une sorte de tension

un corps
un corps

un corps peut changer



je 
t'avoue Seigneur
que j'ignore toujours ce qu'est 
le temps

























une structure

n'importe quelle porte peut nous mener
dans l'envers de
l'espace


une résonance

elle 
cherche le langage à l'état 
natif


une mélodie

le jardin 
de reconnaissance 


une forme achevée
un tournoiement sans fin

un temps 
qui attend un autre temps





les rosaces
sont comme des vues ouvertes
sur le kaléidoscope
verbal



une ligne mélodique

à 
travers les 
rosaces



les contours se suggèrent eux-mêmes

la langue 
miroite et devient par instants
l'objet
d'

une vue

l'esprit sent et prend conscience

des roses du temps
des danses du temps sur lui-même

les parallèles sont à chercher

les choses 
sont invisiblement liées organisées 
en variations 
en fugues

un surcroît 

d'intuition
là où agit le verbe

une parfaite plénitude

une pierre de fondement

une complète jouissance





une patiente soif

le verbe 
est la clé du drame

c'est en lui que la pensée est nouée 
et se résout


un objet tangible 
dans le creux du coude


































avec audace jusqu’à la chimère

quand le fond renonce

à février


audace sans aucune hardiesse

quand le fond décroche et le disque de l'hiver

brûle profond dans son lit




masque sur masque

quand les nerfs chantent  flambent

et enflamment

leur circuit





l’illusion du miroir

quand le fond de février dépasse

et les nuages au-dessus se transforment



pas 
un mot 
pas même chuchoté

quand
l'intérieur des corps tournoie et
se transforme



je ne suis 
ni profond ni silencieux

le fond tombe
et perce avec dépit

le désordre 
soutient le crible à la manœuvre des trop-pleins 
et s’appauvrit dans

un mouvement


les oiseaux
ne sont plus posés tranquillement 

trop d’images
la comédie me consume

le fond 
de l'histoire se révèle 
elle-même



le
récit est froid

et

la 
nuque raide


































l'omission des noms propres

est justifiée par la méthode historique

de ce sage chinois qui 

écrivit


il n'y eut ensuite

pendant neuf règnes

aucune production littéraire



pour ceux qui louchent

le strabisme

peut-être

un sujet de réflexion

ceux qui voient clair se détournent