dimanche, mars 17, 2019






tous

les sujets sont inépuisables

même triviaux











le point mathématique

mis en mouvement est susceptible

de se produire en

une ligne 

infinie



*


entendre le discours

reconnaître le sage

transcender toutes choses

se risquer

s'exposer

faire ressortir  la nature véritable


saisir et accomplir

oublier et dormir



les verbes sont des instruments




































Indeed poetry 

is bounded by silence on all sides

is almost defined by silence



Hayden Carruth

Fallacies of Silence



En effet

la poésie est entourée

par le silence

de tous les côtés

presque définie

par le silence

































reposer son corps

mirer le temps



cet 
espace ressemble 
à

un lac à l'infini


















publier cela

couronner ces choses de fleurs

s'en aller sous l'averse



gravir
les marches du soleil
et jusqu'au 
ciel


































une
terre 
nouvelle
qu'il trouve toute faite

une
beauté

fidèle 
sans ascendants


ici
je jouis 
de la foule et
de la tranquillité 
de hauts sentiers de montagne

sans manuel
en

un
franc dénuement


*




c'est
un pollen

une
poussière
ralentie au beau
milieu du 
texte


la fenêtre était
mouillée 
par

un peu 
d'herbe fraîche
fichée dans la prunelle



*


une terre une beauté
un franc dénuement

un pollen une poussière
un peu d'herbe 
fraîche 

une
randonnée
sur

un
relief de pâte à
modeler



























dire

s'immobiliser en nommant


nommer

et déjà se satisfaire

et vouloir nommer toujours de même


se confier 

à nommer sans se soucier

n'arriver souvent qu'à dénommer


manquer

et essayer de nommer pour remplir








mais

en remplissant risquer de dissimuler

et peut-être d'anéantir ou de vider


soupirer d'obtempérer

pleurer de déterminer

souffrir de paralyser




pleurer

ne plus les considérer comme

des dieux





































Dominique Noguez


Né 
en 1942 à Bolbec 
dans la Seine dite alors  

inférieure 








il vécut 
à Rouen puis à Biarritz 
dans les Pyrénées dites alors 

basses 




puis 
dans diverses villes du vaste
monde 

Paris Rome 
Montréal New York
Kyoto

il 
travaillait en noir 
les Deux veuves 

et en couleur 
l’Arc-en-ciel des humours 

voyait tout 
Je n’ai rien vu à Kyoto 

savait tout
Comment rater 
complètement sa vie en onze leçons 

refaisait les photos 
Les 36 photos 
que je croyais avoir prises à Séville 

les vies 
les Trois Rimbaud 

et même le monde
Aimables
quoique fermes 
propositions pour une politique modeste 

il 
tenait un journal 
depuis l’âge de dix-neuf ans 

il 
a parfois déclaré 
que c’était la seule chose 
qui comptait dans ce qu’il écrivait

on ne peut en décider
cet écrit étant resté introuvable

le meilleur 
de son œuvre est postérieur à 
2003

en guise d’épitaphe

il a fait 
graver sur sa tombe 
ce simple 
conseil 

N’écrivez jamais ! 



































un brun 
une surface une dureté
un autre monde



les 
yeux étaient 
d’

un brun 
foncé presque 
aussi sombres que leur 
pupille

ils 
n’étaient 
qu’

une 
surface 

noire 
désespérément 
opaque









des 
yeux inhumains
de rapace ou de lynx
d’


une 
dureté 
de marbre 
ou de météorite

des yeux 
d’

un 
autre monde

































Jamais je n’avais regardé ses yeux de si près. Ils étaient d’un brun foncé, presque aussi sombres que leur pupille. Je ne pourrais pas écrire que je la regardais au fond des yeux car ces yeux-là n’avaient pas de fond. Ils n’étaient qu’une surface noire, désespérément opaque, des yeux inhumains, de rapace ou de lynx, d’une dureté de marbre ou de météorite, des yeux qui me regardaient mais ne me voyaient pas, qui ne m’aimaient pas, qui ne m’aimeraient jamais, qui n’aimaient ni n’aimeraient jamais personne, des yeux d’un autre monde. 

Amour Noir Dominique Noguez Infini / Gallimard






























































coal searcher going home

Bill Brandt 

*






s'en fut et s'en vint

s'en venir

il
s'en vient

il
s'en vint

il
s'en est venu

il
s'en fut venu



s'en fut alors

s'en fut un soir

s'en fut sous les nuages

s'en fut dans l'ombre





autre

s'en vint clopinant

s'en vint bâton en main

s'en vint foulant la pierre



*




pour aimer

se regarder
profitant de se rafraîchir 

et

s'allier pour commencer
cela aussi



s'unir pour respirer

enfin se dévoiler

ne plus rien se cacher

tout en mesurant combien

se détacher

encore

s'étant seulement fait prêter

comment

se figurer


lointains



























Dimanche 
dépose sur le papier 

une 
parole 
spontanée et nécessaire











une 
succession 
de larges vagues 
déferlent et se retirent


un 
regard 
poétique et photographique 
balaie le monde et s’en imprègne

dans 
son approche oscillatoire du 
vivant

elle
apprivoise
capture et scrute 
puis relâche le flux pour en conserver 

un écho

une 
alchimie 
d’allers-retours 
de l’en-soi à l’autre


*






Ici 
rappelle là-bas

L’hiver et la neige

Le 
brouillard et les corps dissipés

Les 
corps emmitouflés assis près du feu

LE 
regard encadré 

par la porte
par la fenêtre sans vitre 
par le bout du nez de l’autre

Partir ? 

Ne pas partir ? 

...

Dimanche
Anne Penders, 
esperluète éditions, 
2004


Liminaire


*

dimanche

une parole 
une succession un regard 
un écho une alchimie

*


l’éclat et la dispersion

le fragme 

a vocation à être jeté au vent

disséminé

de 
l’utilité du blog 
qui dans ce cas précis 
trouve sa pleine justification