samedi, juillet 07, 2018






America Martin




































Il est difficile 
d’envisager une œuvre plus 
éclatée, 


plus ouverte, plus disparate, 
dans son contenu comme dans son 
expression, que 

Les Cantos d’Ezra Pound









et pourtant cet ensemble est considéré comme le recueil poétique le plus important du XXe siècle. Rédigés entre 1915 et 1966, les poèmes qui le composent chantent l’épopée de « la tribu humaine », tout en acclimatant l’objectivisme et le concrétisme en poésie.


Pour aider le lecteur français à s’orienter dans cette œuvre immense, Jonathan Pollock replace Les Cantos dans le mouvement vorticiste. À la veille de la première guerre mondiale, cette avant-garde londonienne avait fait du tourbillon, ou vortex, le principe central de son esthétique. De fait, si la réunion de tous les canti en un seul volume peut donner l’illusion d’une construction unifiée, en réalité aucune armature structurelle ne fait tenir Les Cantos : ils se maintiennent eux-mêmes à travers la dispersion de leurs éléments, à la manière d’un cyclone, en détruisant toute l’histoire de la poésie sur leur passage…

Lire les Cantos d'Erza Pound

Jonathan Pollock

Essais Hermann






































une pluie vers

toi

une pluie vers

moi

une pluie vers

soi




































7

je parle seul

la cime visible ruisselle






5

une barque de bleu sacré

*

très 

chère apparence 

d'une joie 

une joie noire et sainte



*


une pluie vers toi

7 / 5

pense au murmure  qui vient du sommeil

dans la carrière de craie


*


une vie oubliée

feux fantomatiques

un instant

une âme


des années fenêtres

lacune immortelle



plus jamais chanté chuchoté

ni soupiré


une 
offrande en fleur

un 
sens qui n'est plus

une 
naissance divorcée




7

mars 
brûle les mers et 
les canaux


































Finikias thon tchourékias

loup mayonnaise
pain de bouillabaisse
aïoli  pommes  œufs durs

pilaf  lasagne
macaroni kihyma
tomates  courgettes aubergines farcies
couscous  cannelonis
pâté en croûte
pain  beurre confitures café galettes
gâteau d'amandes chantilly
gâteau de marrons
mille-feuilles  tartes du Saint-Esprit


CAKE DE PAIN SANS LEVAIN













chausson aux pommes chausson italien
charlotte
gâteau croûte du massier au suprême
gâteau au fromage à la mode d'Obwald
gâteau basque
baba au rhum
gratin de nouilles
gratin de viande hachée
gâteau de semoule
nougat noir nougat noir de Saint-Tropez
craquant de pièce montée et sucre traité
tchéblébousès
figues noix noisettes bananes
forêt noire fraisier framboisier
Mont-Blanc franco italien
amandes dattes poires
pruneaux farcis  dattes farcies
poire confite  melon confit
pain de noël pain perdu panettone

HALVA

rascasse camphre morue câpres sumac
eau-de-vie
moules
abricots séchés
pastelli
gigot d'agneau  pommes boulangère
raisiné
religieuse rose des sables
pain sucré à la cannelle et aux girofles
rizoghalo
keftezès
pompe de Noël  gâteau de Saint-Zacharie
Lasagne
figues noires  figues vertes
ragoût de pommes de terre
rôti de bœuf aux oignons avec des haricots
des petits pois des pommes de terre
et un bœuf grillé aux pommes de terre frites
yogourt sucré
brousses sucrées
Saint-Honoré Salambo

notes

43 44   A A
































J'ai commencé un poème sans fin

de nulle catégorie 

humaine


au sujet de tout


Erza Pound à James Joyce  1917




















I have begun an endless poem

of no human 

category


all about everything


































27.   150 151

et

le soleil reposait par-dessus
le vent

et

trois formes advinrent
dans l'air

et

les vagues pareilles à
une forêt



le vent ne pèse pas sur
les feuilles mais
avance

si bien que le son rattrape le son






en dormant dans le rêve 

éveillé

l'air fût mis en 

pétales



brindilles 
là où n'avait été que coup
de vent


rameau qui avance sans racine




l'air éclate feuille

accrochée là  l'acanthe fleurie

distinguez-vous le bas du haut ?

































Le monde avait poussé 

un cri

aigu 


un chant du haut d'une 

montagne



la terre parle  et la salamandre parle



*












les noms  les  petits  mots aventureux

une montagne  la falaise

une vague

relèvent de la taxinomie

je crois au monde parce qu'il est impossible


la cabane sur la côte sous les gouttières






TAXINOMIE / TAXONOMIE

science des lois et des principes de la classification 
des organismes 
vivants

science de la classification



Linguistique distributionnelle


Classification d'éléments
de suites d'éléments formant des listes 
qui permettront 
par leurs règles de combinaison
de rendre compte des phrases d'une langue 






























Musique puissante et myriades

tomber de fatigue

sombrer écrivant ainsi

il n'y a pas de lumière en ce monde

sinon la lumière de ce monde

7 juillet mort de Georges Oppen

*




Certaines choses
Nous entourent « et les voir
Équivaut à se connaître »
Occurrence, élément
D’une série infinie,
Les tristes merveilles ;
Dont fut tirée
L’histoire de notre cruauté.
Qui n’est pas notre cruauté.



Rappelle-toi la ville antique où nous étions allés : assis dans l’embrasure d’une fenêtre en ruine, nous avions essayé d’imaginer que nous appartenions à cette époque révolue — tout cela est mort sans être mort, impossible d’en imaginer l’existence ou la disparition ; la terre parle et la salamandre parle, le printemps survient et ne fait qu’obscurcir cela ––– 



éditions Corti