dimanche, janvier 28, 2018



je vis

des yeux tout proches   interminables
qui s'observaient en moi comme dans
un miroir   je vis tous les miroirs de
la planète et aucun ne me refléta

je vis

une raie   son architecture délicate
teintée de sang rouge  de nerfs bleus
et de muscles blancs  comme la nef
d'une cathédrale polychrome 

je vis

des reflets sur diverses matières
verre  métal  fruits brillants ou 
mats
















deux remarques : 

l'une  sur la nature de l'Aleph   l'autre

sur son nom

Ce dernier
comme on le sait
est celui de la première lettre de l'alphabet
de la langue sacrée

Son application à mon histoire ne paraît pas fortuite

Pour la Cabale
cette lettre signifie le En Soph
la divinité illimitée et pure

on a dit aussi
qu'elle a la forme
d'un homme qui montre
le ciel et la terre

afin d'indiquer
que le monde inférieur est
le miroir et la carte du supérieur

pour la Mengenlehre
c'est le symbole des nombres transfinis
dans lesquels le tout n'est pas plus grand que l'une des parties




























Les textes  sont traversés par un désir d’originalité par où la conscience écrivante entreprend de se dégager de l’emprise funeste du passé pour se porter sans cesse au-devant d’elle-même. 

À cette pulsion projective répond toutefois un mouvement de force contraire qui la ramène dans l’orbe de ses prédécesseurs qu’elle se découvre contrainte de répéter, d’imiter. 

Cette tension entre originalité et imitation, création et citation, conduit le sujet  à revendiquer, sans vergogne et non sans forfanterie, le droit au plagiat, à la contrefaçon, à la captation d’héritage : l’imitation serait bel et bien la condition même de l’originalité ; il n’y aurait de génie que de l’imitation. 

Alors se dessine une autre relation à l’imitation qui ne prend la forme ni de son impossible rejet, ni de son acceptation résignée, mais envisage l’appropriation mimétique comme le moyen de s’inventer soi-même et conçoit la remontée vers le passé comme une manière de se projeter vers l’à-venir – mimesis paradoxale où ne s’imiterait finalement rien d’autre que ce qui vient.



































On dit qu'à Byzance

les hérissons sont capables de sentir

quand soufflent les vents du nord et quand

ceux du sud    et qu'ils changent en conséquence

tout de suite de refuge :  si le vent vient du sud ils

creusent des trous dans le sol    s'il vient du nord

ils les creusent sur les murs








































Dire et redire

recherche précise   au pied du mur

encore persiste l'espoir d'aller de l'avant

de prendre le large

vers le lieu énigmatique

28 janvier naissance de Louis-René des Forêts


*





En 1967, il fonde la revue L'Éphémère, 
avec Yves Bonnefoy, André du Bouchet, Paul Celan, 
Jacques Dupin, Michel Leiris et 
Gaëtan Picon