lundi, avril 11, 2016

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Je dois 
puiser mes mots 
et ma syntaxe dans le champ culturel

















celui de la langue



ma parole
qu'elle soit proférée ou 
inscrite 

m'échappe 

elle est ouverte

elle chute 
nécessairement dans le 

trou


Photographie
Tom Callemin - Hole, 2015




































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Qu'il s'agisse 
d'un roman, d'une poésie, 
















d'un essai ou d'un tableau, le nom de l'auteur offre un repère précieux au lecteur. Il donne des indications sur l'orientation du texte, son sérieux, sa légitimité. Il "présentifie" l'instance d'où l'oeuvre est supposée provenir, ce qui permet de la présenter comme dialogue, conversation ou échange. En nommant l'auteur, on fait croire que sa parole peut être entendue comme s'il était là, ici et maintenant. Mais sur quoi l'authenticité d'une signature, d'une date, d'un style ou d'un genre repose-t-elle? Uniquement sur une croyance, un consensus, le savoir d'un expert, c'est-à-dire un jugement ou une décision. Telle que nous la rencontrons, l'oeuvre est abandonnée, orpheline. Elle n'est la voix d'aucun père vivant, n'est porteuse d'aucune assurance, aucune sécurité.


Nul ne commande ni ne maîtrise l'oeuvre, pas même l'auteur, qui n'est pas son souverain. D'ailleurs qu'est-ce que l'auteur? Est-il obligatoirement une personne unique, déterminée? On peut en douter. Dès le départ, sa fonction est partagée entre plusieurs instances : les autres textes qu'il cite ou auxquels il se réfère, le "je" conscient, les fantasmes ou souvenirs inconscients, les traces ou les spectres qui se disent à travers lui, les traditions et les conflits dont il est le reflet. Entre ces enjeux et d'autres encore, l'oeuvre ne témoigne ni d'un compromis ni d'une construction harmonieuse. C'est le lieu d'un drame ou d'une guerre. On n'écrit jamais solitairement : produire une oeuvre est toujours un rapport à l'autre. Celui qui l'a fabriquée, produite, est lui-même divisé, car il est aussi son premier lecteur.


Dès le départ, l'oeuvre a été volée à celui qui l'a fabriquée (pour autant qu'elle lui aie jamais appartenu). N'ayant jamais été extérieur à son texte, il ne peut pas le surplomber. Il disparaît, il est absorbé dans sa production, et seule la signature, la légende, le droit d'auteur ou un autre artefact rappelle son nom.


L'intention de l'auteur (ce qu'il veut dire), ne peut jamais déterminer les pensées de celui qui s'intéressera à l'oeuvre, la lira, l'entendra ou la regardera. Par structure, pour toute oeuvre, le destinataire est absent et inconnu. La façon dont le texte résonnera chez autrui est imprévisible. Et même lorsqu'un destinataire est nommément désigné - ce qui peut arriver, par exemple, pour une composition musicale ou pour une oeuvre de "Mail Art", l'oeuvre ne peut survivre que si d'autres destinataires s'y ajoutent. Pierre Delain - "L'oeuvre chez Jacques Derrida : concept et principe", Ed : Galgal, 2011-2015.




illustration

Dessin sur le sable de Vanuatu 

Les dessins sur le sable sont une tradition du Vanuatu et une composante notable de la culture nationale. Cette tradition est localisée principalement dans le centre et le nord du Vanuatu.

Moyens de communication éphémère (il y a de nombreux dialectes et langues dans l'archipel), ils rentrent également dans le cadre de rituels traditionnels et ont donc une fonction sociale. Le tracé des dessins est accompagné de chants et récits. Réalisés avec le doigt par des spécialistes, les dessins sont géométriques et souvent symétriques.

























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Robert Filliou 

Bleu

1970

writing on canvas

29 x 23.5 cm

































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entre le e et le t

espace temps

le parcours sinueux du serpent

l'imprégnation totale de la pensée













L'homme est incessamment et nécessairement opposé à ce qui est par le souci de ce qui n'est pas! (...) il enfante laborieusement, ou bien par génie, ce qu'il faut pour donner à ses rêves la puissance et la précision mêmes de la réalité   Valéry, Variété I,1924.

































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L'intuition 
















L'intuition dont nous parlons porte donc avant tout sur la durée intérieure. Elle saisit une succession qui n'est pas juxtaposition, une croissance par le dedans, le prolongement ininterrompu du passé dans un présent qui empiète sur l'avenir. C'est la vision directe de l'esprit par l'esprit. Plus rien d'interposé ; point de réfraction à travers le prisme dont une face est espace et dont l'autre est langage. Au lieu d'états contigus à des états, qui deviendront des mots juxtaposés à des mots, voici la continuité indivisible, et par là substantielle, du flux de la vie intérieure. Intuition signifie donc d'abord conscience, mais conscience immédiate, vision qui se distingue à peine de l'objet vu, connaissance qui est contact et même coïncidence.



























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mutisme

peut couvrir 
des effondrements profonds

















Dans la vie
il y a toujours
une trace de sel



gris-blanc du
sentiment
creusé abrupt

































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Elle met en mémoire
















tous les paysages 
possibles de la poésie moderne

en mémoire



une lame réversible
ajustée
matinale
que la nuit révèle

en mémoire




un ornement de figures géométriques

une géographie des lignes



en mémoire

cet minute d'éveil
qui lui a donné la vision de la pureté



devant une paroi de verre




Photographie
Antinomy Natalia Drepina 



























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Revêtement adhésif 

Uni mat  

noir

















par l'absence d'une couleur

par l'absence de lumière


par une couleur très sombre



sombre

qui reçoit peu de lumière

où la lumière

la clarté

n'est pas intense



te dire cela

et sans cesse apparaître




fais-toi léger




dans le noir de l'air liquide




de la solitude

lecteur 

ralenti ta marche



suspendue


































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Luisa Sartori

Eart/sky #7 2005 Graphite

oil on paper     


































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