mercredi, novembre 27, 2013

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La poésie ne peut être pensée sur le modèle de l’offre et de la demande, puisque l’offre est pléthorique et la demande inexistante. Chacun veut qu’on le lise, personne ne lit. J’exagère à peine : un ami m’écrivait qu’il avait une malle pleine de livres qu’il ne pouvait offrir parce que personne n’en voulait. Ce qui se présente comme une offre est, en réalité, une demande : d’être publié, d’être lu, d’être sinon connu, du moins reconnu comme poète, écrivain, artiste.

            Ce modèle de l’offre et de la demande suppose une complémentarité entre, d’un côté, un petit nombre de « créateurs », actifs, n’attendant que l’admiration qui leur est due, et de l’autre côté le plus grand nombre, passif, le « public », qui ne demanderait qu’à admirer ce qu’il consomme, à consommer ce qu’il admire. Mais le « public » n’existe pas. Les « créateurs » non plus.  Chez ceux qui sont supposés faire masse pour former le premier, ne peuvent s’intéresser aux seconds que ceux qui, eux-mêmes, « créent » peu ou prou. Et ceux qui écrivent ont tous commencé par lire. Il arrive même qu’ils continuent. Pour chercher la poésie, il faut d’abord l’avoir trouvée. Ce qui prime, c’est donc la trouvaille, le ready made, la rencontre, l’étonnement, l’idée idiote qui nous traverse et nous provoque. C’est l’émerveillement. Le lecteur et l’auteur sont une seule et même « Station Underground d’Emerveillement Littéraire », pour reprendre la signature-acrostiche de Lucien Suel. Underground parce que cela n’a rien à voir avec le marché qui repose sur le schéma de l’offre et de la demande. Il s’agit plutôt d’un échange entre des individus pouvant former réseau. Le mail-art, par exemple (Suel l’a beaucoup pratiqué), mais avant le mail art, le courrier. Max Jacob n’écrivait-il pas « une lettre est une œuvre d’art en liberté » ? Il y a réciprocité : je te lis, tu me lis, il n’y a pas d’un côté l’écrivain actif, de l’autre le lecteur passif. La poésie peut être faite par tous, y compris par e-mail et par SMS. Les réseaux peuvent être des revues, la micro-édition. Les « critiques », les « poètes », les « revuistes » sont pour l’essentiel (pour la part la plus vive et la plus libre de ce qui s’écrit et lit) les mêmes personnes, et cela ne représente pas grand monde, ressemblerait plutôt à un échange de courrier : si le courant passe, si des atomes crochus s’accrochent, la correspondance continue. Sinon, non. Ce n’est la faute à personne, c’est comme ça et c’est très bien comme ça. Tant pis si c’est statistiquement négligeable. Tant mieux si ça passe entre les mailles des sondeurs.

















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Hannah Villiger
















Au centre du travail
de Hannah Villiger il y a son propre corps

avec le regard d'un sculpteur
elle l'explore  l'ausculte minutieusement

grâce à l'oeil
mécanique d'un appareil photo

sans pudeur ni narcissisme
elle se concentre quasi uniquement sur

sa personne en tant que forme
et cela sans autobiographie  sans imposer

aucun voyeurisme au spectateur
rompant avec la tradition romantique des

photographies des nus
féminins     l'artiste capte des fragments 

des articulations
des entrelacements qui  cadrés librement 

semblent évoluer 
sans pesanteur dans une atmosphère

où la lumière 
exacerbe les volumes


































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le livre s'organise
autour de ce qui est creux



livre-pensée-plumes




livre-mélange
de citations refaçonnées

paysages

             pluriels

livre-renaissance

labyrinthes multifaces d'éclosions





livre comme kaléidoscope

                                des absences
d'identité



livre
d'ambiguïtés polymorphes

livre
de vitalité polytopique







le livre laisse s'écouler
les instants de notre contemplation participative

la lumière s'enroule
en spirale sur ses pages

le livre est une pulsion du temps




une chose à ne pas oublier

livres 
comme tablettes

livre
en marbre vert de Laconie




livre
comme Versant Est



tu écris ton livre
moi       j'écrirai le mien

ça c'est un livre

c'est un livre-poupée

le livre de l'univers




un livre
est un tournoiement de syntaxe
et de symboles 

un livre entrelacs

un livre sans cohérence

un livre
fait craquer l'écorce du temps




livre- mouche
échappé d'un feu solitaire





























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GRIS BLANC du



sentiment

creusé abrupt.


Vers l'intérieur du pays,


l'élyme  amené par le vent,  ici, souffle,

des dessins                            de sable   par-dessus


la fumée des chants de puits.


une oreille   retranchée       , écoute.








Un oeil, coupé        en lames,

à cela,        rend justice.
















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rêve
forme grise




rêve
sur le sombre

rêve
sur le clair

rêve
un chemin de lande

rêve
suspendu dés l'aube




rêve
entre genêt et pierre

















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