mardi, avril 27, 2010

Un des plus grands écrivains de notre époque, Jorge Luis Borges, expose dans cet essai, issu d'une série de conférences, l'histoire et la doctrine du bouddhisme.
Oeuvre exhaustive : Borges examine les antécédents du bouddhisme et analyse les particularités de cette doctrine : le lamaïsme, le tantrisme et le bouddhisme zen.
Dans ce cours, Borges, grâce à son savoir universel, ne cesse de comparer les doctrines asiatiques avec les religions européennes. Son exposé est d'une profondeur et d'une clarté remarquables
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folio
traduit de l'espagnol par Françoise Marie Rosset
La doctrine du Vedanta se résume en deux célèbres formules
:
Tat twam asi ( tu es cela ) et
Aham brahmasmi ( je suis Brahma )
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Toutes deux affirment l'identité de Dieu et de l'âme, de soi et de l'univers
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Les antécédents du bouddhisme, J.L.Borges et Alica Juardo
qu'est-ce que le bouddhisme
.
L.A. photographie, Luna, Cochette avril 2010
Si on compare la mystique chrétienne ou islamique à celle du bouddhisme, on notera entre elles les affinités suivantes : a) le mépris des schémas rationnels lorsqu'ils ne sont que des moyens ; personne ne pense que les nombreux volumes de la Somme Théologique puissent être l'équivalent de l'expérience de la vérité ; b) la perception intuitive, différente ce celle que peuvent fournir les sens ; c) la connaissance absolue, qui nous donne une certitude complète, que l'exercice de la logique ne peut réfuter ; celui qui la possède peut se passer de prémisses et de conclusions. Une fois maître de la vérité, le mystique s'aperçoit que l'opposition des contraires se fond d'une certaine façon dans une réalité supérieure ; il est donc aussi au-delà des valeurs de la morale courante. Quand saint Augustin écrivit : Aime et fais ce qu'il te plaît, peut-être voulut-il dire que l'homme qui est parvenu à l'amour divin est incapable de mal agir ; d) l'annihilation du Moi. Notre vie passée est absorbée dans le grand Tout ; la paix et le soulagement en sont la récompense immédiate ; e) la vision du multiple univers transformé en une unité ; f ) une sensation de félicité complète
.

Si nous considérons maintenant les traits qui les différencient, nous voyons que le bouddhisme se passe de toute relation personnelle avec un dieu, car c'est une doctrine essentiellement athée où il n'y a ni croyant ni déité. A l'inverse de ce qui marque le judaïsme et ses dérivations, le christianisme et l'islamisme, on note également l'absence de ces concepts pathétiques de faute, de repentir et de pardon. On n'atteint pas le satori par l'adoration, la crainte, la foi, l'amour de Dieu ou la pénitence ; il s'agit ici d'une discipline qui ne vise que la paix et élimine les émotions. Le maître Te-Shan ne pria jamais, ne demanda jamais le pardon de ses fautes, ne vénéra jamais l'image du Bouddha, ne lut jamais les écritures et ne brûla jamais d'encens. De tels actes étaient, à son avis, d'inutiles formalités ; seule l'intéressait l'incessante et l'intense quête mystique
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J.L.Borges et Alica Jurado ; qu'est-ce que le bouddhisme ?
L.A. photographie, pommier , Cochette avril 2010
La vision du multiple univers transformé en une unité
une sensation de félicité complète
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Rappelons les vers de W.Blake
:
To see a world in a grain of sand, / and a Heaven in a wild flower, / hold Infinity in the palm of your hand / and Eternity in an hour. ( Dans un grain de sable voir un monde / et dans chaque fleur des champs le Paradis , / faire tenir l'Infini dans la paume de la main / et l'Eternité dans une heure .)
°
L.A. photographie, Luna, Cochette, avril 2010
La compréhension intellectuelle de la doctrine du Bouddha n'est pas importante ; l'essentiel est une illumination intime, qui semble correspondre à l'extase. Souvenons-nous de la parabole hindoue du voyageur qui parcourt en été un désert et qui, croisant un autre voyageur, lui dit qu'il est mort de fatigue et de soif, et qu'il est à la recherche d'une source. L'autre lui indique le chemin. Cette indication n'apaisera pas sa soif et ne soulagera pas sa fatigue ; il faut pour cela que le voyageur parvienne lui-même à la source. Le désert est la naissance et la mort ; le premier voyageur est tout être vivant ; le second est le Bouddha ; la source est le Nirvana.
l'essence-ciel est une illumination intime
.

L.A. photographie,
chêne forêt de Mance, avril 2010
Pieuse, pure et belle,
tout a concomité vers
ce point où elle marche sur le
sentier de la Liffey foulant les
feuillets morts de la vie dont
le silence jusqu'ici a brillé
comme la sphère d'argent de
la pierre albâtros, cette fontaine
de Mantoue qui distille
sa musique alerte sur un ton
liquide d'odeurs soupir de
musc, Glouglouglou, c'était
très bon ma chère
.
J.J.F.W.
2964 /437
Pétales d'aubépine rendues au sol
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L.A. photographie, Briey, avril 2010
Dormir à la belle eau,
tisonner le feu,
secouer la poussière de la terre,
et rêver à celle qui me donnerait
les ailes de ses boucles
au vent
.
J.J.F.W.
F. 2964 / P.437
On trouve chez Aristote et Spinoza au fond la même idée :
la joie, c'est l'accompagnement d'une affirmation.
Une affirmation libre : tout est facile.
La joie augmente et s'enrichit avec la répétition.
Dans la marche la joie est une basse continue
.



L.A. photographies,
autour du Plan d'eau, Briey, avril 2010